TESTO DEL LIED
"Pastorale des cochons roses"di Edmond Rostand (1868-1918)
Le jour s'annonce à l'Orient,
De pourpre se coloriant,
Le doigt du matin souriant
Ouvre es roses!
Et sous la garde d'un gamin
Qui tient une gaule à la main,
On voit passer sur le chemin
Les cochons roses.
Le rose rare au ton charmant
Qu'à l'horizon, en ce moment,
Là-bas, au bord du firmament
On voit s'étendre,
Ne réjouit pas tant les yeux,
N'est pas si frais et si joyeux
Que celui des cochons soyeux
D'un rose tendre!
Le zéphir, ce doux maraudeur,
Porte plus d'un parfum rôdeur
Et dans la matinale odeur
Des églantines,
Les petits cochons transportés
Ont d'exquises vivacités
Et d'insouciantes gaietés
Pres qu'enfantines;
Heureux, poussant de petits cris,
Ils vont par les sentiers fleuris
Et ce sont des jeux et des ris
Remplis de grâces;
Ils vont, et tous ces corps charnus
Sont si roses qu'ils semblent nus
Comme ceux d'amours ingénus
Aux formes grasses.
Des points oirs dans ce rose clair
Semblant des truffes dans leur chair,
Leur donnent vaguement un air
De galantine;
Et leur petit trottinement,
A cette graisse, incessamment,
Communique un tremblottement
De gélatine.
Le long du ruisseau floflottant,
Ils suivent tout en ronflotant
La blouse au large dos flottant
De toile bleue, ils trottent
Les petits cochons,
Les gorets gras et folichons,
Remuant les tire-bouchons
Que fait leur queue!
Puis, quand les champs sans papillons
Exhaleront de leurs sillons
Les plaintes douces des grillons
Toujours pareilles,
Les cochons rentrant au bercail
Défileront sous le portail
Agitant le double éventail
De leurs oreilles;
Et quand là-bas, à l'occident,
Croulera le soleil ardent,
A l'heure où le soir descendant
Ferme les roses,
Paisiblement couchés en rond,
Près de l'auge couleur marron,
Bien repus ils s'endormiront,
Les cochons roses!